Pogacar, Evenepoel, van der Poel ou un autre : à qui le maillot arc-en-ciel ?
La course en ligne des championnats du monde de cyclisme consacrera dimanche le nouveau porteur du maillot irisé, autour de Zürich.
Dans les rues de Zürich, la cité économique suisse majeure, les cadors du peloton vont pouvoir régler leurs comptes. Après les chronos, place au clou du spectacle des Mondiaux de cyclisme avec les courses en ligne. Chez les hommes, la succession à Mathieu van der Poel est ouverte, avec un trio majeur et une foule de prétendants. Difficile toutefois de ne pas faire du triumvirat van der Poel - Tadej Pogacar - Remco Evenepoel le favori de cette édition 2024, sur le papier faite pour un costaud autour de la cité helvétique.
Dans cette catégorie de coureurs, peu arrivent à la cheville de ces trois gloutons du peloton sur les courses d'un jour, pour peu qu'elles soient un peu sélectives. Mathieu van der Poel tentera de conserver son maillot arc-en-ciel, le Néerlandais ayant fait de ces Championnats du monde une de ses priorités, jusqu'à en perdre deux kilos pour espérer être plus compétitif.
Van der Poel ne s'estime pas être "l'un des grands favoris"
"MVDP" a retrouvé la victoire, sa 50e chez les professionnels, lors de la première étape du Tour du Luxembourg le 18 septembre dernier. Mais il s'est fait piéger par le marquage de ses adversaires pour le classement général dans la dernière étape. Un scénario identique à celui de la course des Jeux olympiques à Paris cet été, où son mano a mano avec Wout van Aert avait fini par enterrer les espoirs de sacre des deux compères, laissant filer Remco Evenepoel vers la médaille d'or.
Cette fois, van Aert, blessé après sa chute sur le Tour d'Espagne, n'est pas de la partie. Et le tenant du titre n'est pas la cible à abattre. "J'ai une petite chance, je ne suis pas l'un des grands favoris de cette course mais cela pourrait me donner un peu plus de marge de manœuvre", a-t-il pronostiqué avant les Championnats d'Europe. Le parcours, une portion au départ de Winterthur puis sept boucles dans Zürich avec notamment sa côte de Witikon (1,9 kilomètre à 6,3%), semble moins taillé pour Mathieu van der Poel, un peu moins à l'aise dans la répétition des petites montées (4470m de dénivelé total) où sa puissance ne peut faire autant de dégâts.
Le doublé mondial après celui olympique pour Evenepoel ?
Tadej Pogacar et Remco Evenepoel peuvent s'en frotter les mains. Evenepoel a déjà réussi ses Mondiaux en conservant son titre du contre-la-montre dimanche dernier. Le Belge n'a pas éparpillé la concurrence mais il n'a pas pour autant tremblé malgré plusieurs contretemps (saut de chaîne au départ, capteur de puissance en panne toute la course). Le coureur de la Soudal - Quick-Step peut signer un grand chelem inédit dans l'histoire du cyclisme. Après avoir été le premier à réaliser le doublé course en ligne - chrono des Jeux olympiques en août, il pourrait aussi en faire de même lors des Mondiaux, là aussi du jamais-vu.
Malade après les JO de Paris, Remco Evenepoel semble avoir retrouvé des jambes au bon moment. Il pourra aussi s'appuyer sur la part du nombre côté belge, avec Tim Wellens, Tiesj Benoot et Maxim van Gils pour l'entourer dans les moments cruciaux, ou encore Jasper Stuyven, bras droit de circonstance ou plan B de la sélection d'outre-Quiévrain.
Tadej Pogacar, légitime prétendant numéro un
Evenepoel n'est pas le seul à viser les annales de la petite reine dimanche. Tadej Pogacar peut devenir le troisième coureur de l'histoire après Eddy Merckx et Stephen Roche à signer la "Triple Couronne" Tour d'Italie - Tour de France - Mondiaux. Si la plupart de ses rivaux ont laissé quelques forces dans les Jeux olympiques et/ou le Tour d'Espagne, le Slovène arrive frais et en forme. Sa démonstration dans son style caractéristique sur le Grand Prix de Montréal le 15 septembre dernier avec une attaque à 23 kilomètres de l'arrivée pour s'imposer en solitaire ne laisse pas de doutes sur sa condition. "Cette victoire aujourd'hui me donne assurément de la confiance et de la motivation pour les Mondiaux" avançait-il. Mais s'il est parfaitement entouré le reste de la saison par l'armada d'UAE-Emirates, qu'en sera-t-il avec la sélection slovène dimanche ?
Primoz Roglic, vainqueur de la Vuelta, est évidemment plus qu'un lieutenant. Mais jouera-t-il à fond la course d'équipe quitte à sacrifier ses légitimes ambitions personnelles ? Et qui pourra faire l'écrémage auquel "Pogi" est habitué ? Matej Mohoric est lourdement tombé quelques jours plus tôt en préparant les Mondiaux de gravel, et reste incertain pour le départ. Jan Tratnik risque de se sentir un peu seul comme bras droit référencé, lui qui figure le reste de la saison dans la locomotive de la VIsma | Lease a bike.
Marc Hirschi se rêve roi sur ses terres, la très grosse cote Alaphilippe
Derrière le monstre à trois têtes attendu, les outsiders sont nombreux, d'autant plus sur ce format par nation qui ajoute une dose supplémentaire d'inconnu. Le vainqueur surprise de 2019 Mads Pedersen (Danemark), Michael Matthews (Australie) et ses cinq Tops 10 aux Mondiaux, ou encore Biniam Girmay (Erythrée)… Les traditionnelles têtes d'affiche des classiques peuvent nourrir des ambitions, et devront se montrer de toute façon audacieuses pour perturber le plan de route du trio des favoris.
La France aura pour elle l'expérience des dernières années, avec les titres de Julian Alaphilippe en 2020 et 2021 ou encore la deuxième place de Christophe Laporte en 2022. Alaphilippe a perdu de sa superbe, mais "Loulou" reste un client solide sur les courses d'un jour dont il connaît parfaitement les ficelles. Le vice-champion olympique Valentin Madouas, le futur retraité Romain Bardet ou encore David Gaudu, sixième de la Vuelta et vainqueur de la dernière étape du Tour du Luxembourg une semaine plus tôt, ont aussi des arguments pour se mettre en vue.
Question forme, le Suisse Marc Hirschi pourrait difficilement faire mieux avec cinq victoires lors des cinq dernières classiques qu'il a disputées, dont la Clasica San Sebastian et la Bretagne Classic - Ouest-France, ex-Grand Prix de Plouay. "J’ai la chance de mon côté en ce moment et j’espère que cela va continuer" se félicitait Hirschi, qui frapperait un grand coup avant de rejoindre la formation helvète Tudor la saison prochaine - avec Julian Alaphilippe - dont la présence du champion du monde dans ses rangs la rapprocherait des invitations pour les grands rendez-vous de la saison.
Après tout, les derniers Mondiaux en Suisse, en 2009, avaient accouché d'une surprise, avec la victoire de l'Australien Cadel Evans, vainqueur après avoir s'être extirpé dans le dernier tour d'un groupe de grands noms comme Joaquim Rodriguez, Alejandro Valverde ou encore le héros local Fabian Cancellara.