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Paris 2024 : Nikola Karabatic envoyé à la retraite par l’Allemagne
Emu et célébré sur le terrain, la légende du handball a vu sa carrière se stopper net en quarts de finale des Jeux olympiques de Paris 2024.
Au centre du terrain aux teintes bleues turquoises dans l’immense stade de Lille, Nikola Karabatic est seul. Tout autour, les joueurs français et allemands ont formé un arc de cercle et l’applaudissent. Dans les travées, le public scande son nom. Le joueur de 40 ans salue tout le monde d’un geste et invite rapidement à ses côtés Valentin Porte et Vincent Gérard, ses coéquipiers qui eux aussi disent au revoir à l’équipe de France et au handball. Quelques instants plus tôt, il n’a pas réussi à aider les Bleus à se qualifier en demi-finales, assistant impuissant à la perte de balle de trop de Dika Mem.
La France menait d’un but à 6 secondes de la fin et sur l’engagement, le gaucher se retrouva encerclé par quatre joueurs et rendit le ballon. Une faute, qu’il regrettera longtemps et amèrement, qui permit aux Allemands d’égaliser avant de s’imposer en prolongations (35-34 a.p.). "Cruel ? Ça fait partie du sport. C’est cruel par le déroulé du match qu’on avait en main. On doit le gagner ce match. Il y avait 1 % de chance qu’ils gagnent et ça se passe… C’est terrible d’avoir un coup du destin comme ça mais il faut l’accepter. C’est le sport, c’est la vie. Je savais que ça pouvait être mon dernier match. J’aurais tellement voulu aller en demi-finale, gagner une médaille de plus pour cette équipe, pour moi, pour nos supporters", a réagi au micro de France TV celui qui aura longtemps été le guide tricolore.
La France qui gagne
Nikola Karabatic n’était pas qu’un simple joueur. Il est l’un des plus grands qui n’ait jamais foulé un terrain de handball et probablement l’un des plus grands sportifs français. Il était pourtant difficile en 2001 quand il débuta en professionnel à 17 ans, d’imaginer que ce garçon né à Niš en ex-Yougoslavie allait à ce point marquer l’histoire de son sport, jusqu’à en être son incarnation.
Dès 2003, il est de l’équipe de Montpellier qui remporte la Coupe d’Europe. Bien qu’âgé de 19 ans, il inscrit 11 buts lors de la manche aller de la finale perdue à Pampelune (19-27) et participe à l’exploit du retour, ajoutant 5 unités (31-19). Il soulèvera à deux autres reprises ce trophée couronnant le meilleur club d’Europe, une fois avec Kiel (2007) où il partit pour devenir le meilleur joueur du monde au contact de son mentor et second "père" Zvonimir « Noka » Serdarušić et l’autre avec le FC Barcelone (2015).
S’il a brillé partout où il est passé, grâce à son engagement constant, son leadership, sa soif de vaincre et sa façon d’être décisif dans les moments qui comptent, c’est avec les Bleus qu’il s’est s’installé au sommet. Alors que la France du handball s’est éveillée en 1992 avec les Barjots en bronze à Barcelone, lui et la génération des Omeyer, Gille, Guigou et autres Fernandez ou Abalo, les auto-proclamés "Experts", vont achever la mue et faire de la France une référence absolue. Après un premier titre européen en 2006, il sera un des artisans principaux de l’épopée chinoise aux Jeux olympiques de Pékin 2008. Le début de quatre années d’une domination sans partage où les tricolores rafleront tous les titres dont l’or mondial en 2009 à Zagreb face à la Croatie d’Ivano Balić, l’autre meilleur joueur du monde à l’époque dans une ambiance irrespirable.
Sacré à trois reprises meilleur joueur du monde, il aura su être le joueur ultime, à la fois attaquant redoutable d’efficacité, et dur au mal, organisateur du jeu et défenseur impitoyable. Sa grandeur aura aussi été de savoir durer et d’étirer sa carrière sur près de 23 ans. Vingt-trois années au plus haut niveau où rien ne lui aura résisté à l’exception peut-être de la Coupe d’Europe avec le PSG.
Une grande fierté
Au moment de se retirer, les larmes ont commencé à perler dans ses yeux. "Je suis heureux d’avoir joué avec cette équipe, d’avoir participé à ces Jeux olympiques, vécu ces atmosphères. Terminer à Lille dans la plus grande salle de sport de France, je vais retenir ça. Je suis un peu moins triste que les autres car je repense à toutes les campagnes et je suis heureux de refermer cette page et de me lancer dans une nouvelle vie. 22 ans d’aventures en Bleu, c’était un rêve de gamin. J’ai dépassé mes rêves plus d’une fois. Mon rêve, c’était de porter ce maillot et le faire briller au plus haut niveau. Nous l’avons fait et j’en suis fier", a-t-il fini par dire après une accolade avec Jérôme Fernandez, seul joueur ayant inscrit plus de buts que lui en équipe de France.
Ce n’était probablement pas la fin qu’il avait imaginée et certainement pas celle qu’on lui souhaitait, lui qui aurait mérité de partir au plus haut avec une quatrième médaille d’or olympique autour du cou. Le destin en a décidé autrement et ce n’était peut-être pas un hasard que son dernier adversaire soit cette Allemagne où il était parti plus jeune et où il a appris à tout gagner, avant de l’apprendre à tout un pays, aujourd’hui reconnaissant.