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Changer de pilote en cours de saison, entre coups de maître et coups d'épée dans l'eau
Daniel Ricciardo écarté par Racing Bulls, un nouveau changement de pilote a eu lieu au cours de cette saison 2024, une tentative aux résultats très hétérogènes par le passé.
L'épée de Damoclès a fini par tomber sur la nuque de Daniel Ricciardo. Le pilote australien a perdu sa place chez Racing Bulls, un an à peine après son retour en Formule 1. A partir du Grand Prix des Etats-Unis ce week-end, le Néo-Zélandais Liam Lawson prendra le deuxième baquet de l'écurie petite sœur de Red Bull. Comme Ricciardo, qui avait lui-même suppléé le Néerlandais Nyck de Vries en cours d'exercice en 2023, d'autres pilotes ont été au cœur de changements de plans en pleine saison. Si la manœuvre n'a rien de nouvelle, elle n'a pas toujours eu les résultats escomptés.
Des légendes entrées par la petite porte
Dans certains cas, ces coups de dé se sont avérés être des coups de génie, lançant certaines des plus belles carrières de l'histoire de la discipline. En 1991, un des futurs géants de la F1 a fait l'objet non pas d'un, mais de deux remplacements en cours de route. Alors que le Suisse Bertrand Gachot est empêtré dans des démêlées judiciaires pour avoir aspergé de gaz lacrymogène un chauffeur de taxi en Angleterre, Jordan fait appel à un jeune Allemand inconnu, Michael Schumacher, pour le Grand Prix de Belgique. Sans jamais avoir effectué de véritable test, Schumacher épate le paddock en se qualifiant septième sur l'exigeant tracé de Spa. Si sa course ne dure que quelques centaines de mètres pour un problème mécanique, le pilote d'outre-Rhin a tapé dans l'œil de Jordan qui souhaite le conserver pour le reste de l'année, mais aussi de Benetton. La guerre des contrats se conclut par la signature de celui qui sera septuple champion du monde avec Benetton, pendant que Jordan récupère… Roberto Moreno, dont Schumacher venait de récupérer le volant.
S'il avait déjà roulé le temps d'une course chez BMW en remplacement de Robert Kubica, blessé, un autre Allemand a véritablement fait ses débuts en obtenant sa place en plein cœur de saison : Sebastian Vettel. L'Américain Scott Speed ne faisant pas l'affaire chez Toro Rosso, Vettel rejoint le giron Red Bull fin juillet 2007. Prometteur mais dans une voiture très limitée techniquement, il devient la saison suivante le plus jeune auteur d'une pole position et le plus jeune vainqueur de Grand Prix en remportant à la surprise générale le Grand Prix d'Italie. Red Bull lui ouvre les bras, où il y règnera sur son sport de 2010 à 2013.
Ses records de précocité du quadruple champion du monde ont depuis été battus par Max Verstappen, promu après quatre Grands Prix de chez Toro Rosso vers Red Bull à la place du Russe Daniil Kvyat, qui avait fait le chemin inverse. Pour le résultat que l'on sait : le Néerlandais s'est imposé dès sa toute première course en Espagne, à seulement 18 ans et 7 mois, avant de progresser au fil des saisons et de décrocher la couronne mondiale lors des trois dernières saisons.
Red Bull et Renault, les habitués
Le clan Red Bull est coutumier de ce type de transferts entre ses deux entités présentes sur la grille. Mais ils ne donnent pas toujours des ailes pour autant. Pierre Gasly n'avait eu le droit qu'à douze courses lors de la première partie de saison 2019, avant d'être déclassé chez Toro Rosso, faute de résultats suffisants. Son successeur Alex Albon ne fera pas beaucoup plus long feu (26 courses), perdant sa place sur la grille pendant un an, quand Gasly retrouvera des couleurs chez l'écurie petite sœur, devenue Alpha Tauri, sans retrouver un volant dans une écurie de premier plan.
Recruté pour remplacer Gasly début 2023, le Néerlandais Nyck de Vries n'aura pu disputer que dix Grands Prix avant d'être à son tour écarté pour des résultats peu concluants autant qu'à cause de la politique sportive agressive menée par Red Bull. Daniel Ricciardo avait alors été appelé à la rescousse pour relancer sa carrière et apporter son expérience, sans beaucoup plus de succès. L'Australien est désormais du mauvais côté de l'affaire, laissant sa place à Liam Lawson, alors que Red Bull renoue avec sa volonté de formation de jeunes talents.
Pas autant dans l'ADN de la structure, Renault n'a pas non plus hésité à procéder à des changements en cours de saison en cas de contreperformances répétées. Vainqueur à Monaco en début de saison, seul succès de la firme au losange cette saison-là, Jarno Trulli termine 2004 en chute libre et en conflit ouvert avec le patron sportif Flavio Briatore. A trois courses de la fin, l'Italien est remercié alors que Renault se bat pour terminer deuxième du classement constructeurs. Le recrutement du champion du monde 1997 Jacques Villeneuve est un fiasco : le Canadien ne rapporte aucun point et l'écurie finit derrière BAR Honda dans la hiérarchie.
La nomination à la surprise générale de Romain Grosjean, jeune pilote d'essai, pour prendre la suite de Nelson Piquet Jr en 2009 s'était là aussi soldé sur un échec. Trop inexpérimenté alors qu'il n'avait pas encore pris part à la moindre séance d'essai avec la monoplace, il n'inscrit pas de point en sept courses et mettre trois ans à retrouver un baquet. Le vécu de Carlos Sainz Jr ne lui aura pas été beaucoup plus utile en 2017 quand son recrutement pour la saison suivante est anticipé, à la place de Jolyon Palmer. Un an et quelques mois plus tard, Renault le laisse partir pour faire de la place à Daniel Ricciardo.
Souvent anecdotique
Ces transferts en milieu de saison répondent autant aux mauvaises performances d'un titulaire dans une monoplace, que de l'opportunité d'un pari pour le remplacer. Que ce soit par de jeunes promesses en devenir ou par des pilotes référencés et libres, ces mouvements n'en restent pas moins fréquemment vite oubliés, car sans grand effet par la suite.
Celui plus tôt cette saison qui a conduit Williams à se séparer de Logan Sargeant et de donner sa chance à l'Argentin Franco Colapinto est pour le moment concluant (dans les points dès son deuxième Grand Prix), mais restera sans lendemain, puisque l'écurie a déjà son binôme Albon - Sainz pour 2025. A l'image de nombreux changements en pleine saison, qui tiennent davantage de la rustine temporaire que d'une véritable valeur ajoutée. A Liam Lawson, convaincant lors de sa pige la saison dernière durant la blessure de Daniel Ricciardo, de profiter de l'opportunité pour peut-être décrocher une place plus pérenne, alors que le deuxième volant de Racing Bulls en 2025 reste à prendre.